Le secret d’ Emma …5ème partie

Emma me raconte cette épisode de sa vie avec beaucoup de précision je sens qu’elle doit être fatiguée mais elle refuse d’aller se reposer car elle dit que dormir c’est une perte de temps pour elle et qu’elle n’en a pas de trop…
Elle se hâte donc de continuer d’une voix un peu essoufflée cette fois, à tel point que je lui propose de continuer demain…

Non ma chère dit-elle demain il sera peut-être trop tard…
Elle reprend donc son récit…

J’avais montré ma robe de bal à mère et elle en avait trouvé la couleur trop foncée pour mon âge mais elle ne l’avait pas vue sur moi d’autant plus qu’elle faisait des cataractes et qu’elle voyait mal les couleurs sombres…

Le jour du bal, elle était un peu enrhumée…
Excellente excuse pour rester à la maison…
Après avoir revêtu la fameuse robe d’organza noire agrémentée d’un bustier craqué de couleur rose et d’une fine ceinture rose dont le ruban attaché à l’arrière descend presque jusqu’aux chevilles, je me regarde dans le miroir en virevoltant et je ne peux que me sentir ravie de mon choix…

Je descends le grand escalier tout doucement pour surprendre ma mère qui me tourne le dos…
Il ne me reste que 5 marches à descendre lorsque je l’interpelle en lui disant :
Alors, mère, qu’en dites vous?
Je continue à descendre en jouant un peu au mannequin…

Elle est estomaquée et s’approche en me tendant les bras…
Comme tu es belle…
J’avoue que si j’avais magasiné avec toi je ne t’aurais jamais laissé essayer cette robe…
Mais maintenant, je vois que tu as eu raison et qu’aucune autre fille ou femme n’aura pareille merveille au bal…
Puis ces chaussures roses sont dignes d’un conte de fée…
Merci maman, j’avoue que j’ai dépensé beaucoup d’argent mais je n’ai pu résister après l’avoir essayée...
Et vous auriez dû voir le visage de la jeune vendeuse dès que je suis sortie de la salle d’essayage…
J’étais la seule cliente du magasin et elle se demandait si je l’achèterais…

Tu mets ton vison gris ou le noir?
Je vais essayer les deux et vous me direz ce qui convient le mieux…
Le noir, dit elle avec un tel enthousiasme que je l’ai vue rajeunir de 10 ans…
Comme ton père serait fier de toi…

Vu qu’il y avait un grand banquet avant le bal, le chauffeur vint me conduire au Manoir après avoir cueilli mon amie Marie dont les parents ignoraient toujours ces sorties…
Ils disaient qu’ils étaient trop vieux pour ce genre d’évènement…
Les tables pouvaient accueillir 10 personnes et nous n’étions que 9 vu que ma mère s’était sentie malade au dernier moment…
Le père de Marie dit :
Il parait qu’ils vont profiter de l’occasion pour décorer certains militaires qui ont bravement sauvé des vies en risquant la leur…
C’est très émouvant dis-je…
Quelqu’un de la famille de Marie avait demandé une table éloignée de l’orchestre afin de pouvoir converser quand la musique jouera…

Après avoir mangé un repas de haute gastronomie pendant lequel l’orchestre jouait en sourdine des airs à la mode, nous avons dû rester à table lorsqu’ un Général dont la poitrine était décorée d’une multitude de médailles est monté sur la scène …
Prenant la parole il fit un court discours pour souhaiter la bienvenue aux 200 personnes qui avaient accepté l’invitation à cet évènement…
Merci aussi de votre générosité lors de l’achat de vos billets, le montant total sera versé à La Croix Rouge Canadienne qui porte secours non seulement pendant une guerre mais quand il se produit des séismes partout dans le monde…
Les applaudissements fusent dans l’assistance…

Puis, il nomme quelques braves soldats de l’armée navale, de l’air et terrestre… Ils étaient tous assis à une grande table d’honneur et chacun se levait en faisant le salut militaire quand son nom était appelé puis il allait chercher sa médaille en saluant le Général de nouveau…
La cérémonie dura environ 20 minutes après quoi la musique commença à vibrer et le Général invita la femme de Monsieur le maire pour ouvrir le bal au son d’une valse pendant que le Monsieur le maire invitait l’épouse du Général…
Puis, la pièce suivante, plus rythmée, a incité les plus mordus de ce genre de musique à envahir la piste de danse sur un Foxtrot endiablé…
À notre table personne ne s’est levé durant près d’une demi-heure et personne n’est venu nous demander à danser mes amies et moi…
Soudain l’orchestre a entamé un Tango langoureux qui me rappelait de douloureux souvenirs…
Nerveusement, je jasais avec Marie lorsqu’une main s’est posée sur la mienne…
Un militaire me dit : Vous permettez madame?
Avec les lumières tamisées je ne voyais qu’un uniforme mais je reconnaissais cette voix grave…
Je me suis levée et j’ai dansé ce tango comme je ne l’avais jamais fait…
Presque personne n’avait osé danser sur ce genre de musique que Monsieur le curé avait désapprouvée en chaire et la piste était presque vide…
Gontran me conduisait de main de maitre…
Il me frôlait du genou d’un peu trop près mais j’adorais ça…
Il chuchotait des mots doux à mon oreille…
Ceux que j’aurais voulu entendre à l’hôtel Mont-Royal…
Je croyais rêver…

Quand l’orchestre s’arrêta il me reconduit à ma table et comme il y avait un fauteuil vide il demanda aux parents de mes amies s’il pouvait se joindre à nous…
Devant l’approbation de tous il prit place auprès de moi en me disant qu’il réservait la prochaine valse…

Durant la soirée il fit danser les dames et Marie pendant que d’autres militaires venaient à la rescousse pour faire danser les dames dont les maris étaient plutôt occupés à prendre un verre entre eux…
Emma avait bien vu le regard d’admiration qu’il avait posé sur elle quand il l’avait demandée à danser…
Elle était heureuse même s’il devait danser avec d’autres dames âgées qui étaient fières d’évoluer dans ses bras…
Avant de quitter, Gontran dit qu’il demeurait au Manoir car il devait revêtir ses habits civils pour accomplir son travail actuel…
L’uniforme de ce soir n’est de mise que lors des soirées spéciales ou quand un soldat se marie ou décède en devoir et qu’il a droit à des funérailles militaires…
Bonsoir mesdames, mesdemoiselles et messieurs, c’est avec regret que je vous quitte mais comme toute bonne chose doit avoir une fin, je vous laisse en vous souhaitant bonne nuit…

La soirée fut trop courte à mon gout naturellement, puis vers 3 heures le chauffeur vint chercher ces demoiselles pour les ramener chez elles…
Mère m’attendait naturellement et je dus prendre le thé avec elle avant d’aller au lit…
J’ai dû lui raconter la soirée en omettant le Tango lascif évidemment…

Le lendemain Marie me téléphone en me disant qu’elle veut aller au parc et je me demandais si tu viendrais avec moi…
Avec plaisir puisque je n’ai pris aucun engagement pour aujourd’hui…

Marie a négligé de dire que c’était le parc en Face du Manoir car on savait que des commères écoutaient sur la ligne…
Mais les commères étaient sur le téléphone tôt l’après- midi pour raconter à qui voulait l’entendre que j’avais dansé cette danse scandaleuse malgré la présence de Monsieur le Curé…
Comme mère ne se prêtait pas à ces indiscrétions elle ignorait ce qui se disait…

Quand je suis partie elle me souhaita une belle randonnée avec Marie…

Tout en marchant, Marie me dit qu’elle avait rendez-vous avec un garçon qui avait dansé avec elle…
En plaisantant je lui dis : Pas celui avec qui j’ai dansé le tango?
T’es folle?
Il n’avait d’yeux que pour toi et il aurait certainement dansé toutes les danses avec toi…
Vous vous complétiez et formiez un si beau couple!
T’es sure que tu ne le connaissais pas?
Pas du tout dis-je…

Croyez-vous qu’Emma court un danger en revoyant Gontran et ne risque-t-elle pas de perdre sa réputation dans cette aventure?

C’est ce que vous saurez la semaine prochaine alors que je vous révélerai la suite de son ce gros problème…

Votre amie qui vous dit :


À bientôt…

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